lundi 7 juillet 2014

Chers Épicuriens... (2) : La Liberté mène à l'Équité.

Je crois que j'ai été un peu dur avec les épicuriens, dans un précédent article. En réalité, je pourrais vous expliquer leur doctrine en entier, incluant leur vision physique et morale du monde (je le ferai peut-être plus tard d'ailleurs ^^), et je vous montrerais alors que ce n'est pas si mal, comme doctrine.

Mais je ne suis pas là pour détailler. Déjà parce qu'il est relativement tard tôt. Ensuite parce que ça ne servirait à rien pour ce que je veux montrer.

Dans le précédent article, mon principal reproche à ces chers épicuriens était le caractère égoïste de leur doctrine : "Rien ne dit que je dois donner à autrui, aider autrui, et, somme toute, je peux être heureux seul".

Sauf qu'il m'apparaît après une plus ample réflexion qu'il n'en est rien. Car en effet, entretenir de bons liens sociaux avec autrui, cela procure un plaisir, et c'est de source naturelle. Plus encore : je dirais que c'est nécessaire à l'être humain.

Je ne le répèterai sans doute jamais assez : l'humain est un animal social. Un "animal politique" chez Aristote, un "homo faber" ("homme qui fabrique") pour d'autres, "homo sapiens" ("homme qui sait") pour d'autres encore... Quelle que soit la conception, on remarque en effet que l'humain est social : la politique, c'est la gestion de la société ; pour fabriquer, il faut un savoir ; pour savoir, il faut une culture, et la culture ne se conçoit point sans société. Ainsi, on voit bien que l'on a affaire à un homo sapiens, faber, tout autant que politicus. Et il ne peut donc survivre seul, il a besoin d'une quelconque société.

Aussi, la doctrine épicurienne (et, il faut bien que je le précise, celle de Spinoza qui lui est similaire en nombre de points) conduit-elle naturellement à s'occuper d'autrui et à développer les liens que chacun a avec l'autre.

*

Plus encore, la doctrine spinoziste permet de déduire une proposition tout à fait intéressante :

En effet, pour Spinoza, l'humain tend à vivre, donc à faire vivre sa progéniture (c'est à dire, à vivre lui-même, mais autrement). Cependant, vivre est plus ou moins facile en fonction de différents facteurs. Spinoza considère que le plus important de ces facteurs (auquel on peut sans doute réduire tous les autres) est la "puissance d'agir". En effet, plus un humain peut faire de choses différentes, plus il est apte à faire face à des situations différentes, nouvelles ou complexes. Cette puissance d'agir, c'est ce que Spinoza nomme la Liberté.

Ainsi, l'humain tend à vivre, à "se conserver dans son être", dirait Spinoza. Pour cela, comme le diraient également les épicuriens, il a besoin, c'est chose naturelle et nécessaire, d'entretenir des liens cordiaux avec autrui.

Mais l'humain ne peut-il aussi augmenter sa puissance d'agir en tuant ou volant autrui ? Évidemment. Pourtant, il est aisé de concevoir qu'en tuant ou volant autrui, on récupère une partie de sa puissance d'agir. Or, on voit aussi très bien qu'il est impossible de récupérer la totalité de sa puissance d'agir en le tuant ou le volant, totalité qui n'est accessible qu'à lui et lui seul lorsqu'il est entier, inviolé.

D'autre part, l'un des outils extrêmement efficients de l'être humain, c'est le langage. Celui-ci lui permet de communiquer des idées, de créer un lien entre soi et autrui. Une fois ce lien établi, deux humains peuvent alors s'entraider, et c'est ainsi que peuvent s'additionner entièrement leurs puissances d'agir. C'est le moyen le plus efficace d'augmenter sa puissance d'agir. Dans un groupe de quatre personnes qui s'entraident, il n'y a plus seulement quatre puissances d'agir isolées, mais, en fait, quatre fois l'alliance de quatre puissances d'agir, ce qui est évidemment beaucoup plus.

Et, pour finir avec un peu de poésie, on pourra illustrer ce propos en tirant succinctement la langue aux mathématiques, dans un domaine où elles ne s'appliquent pas vraiment :
Deux personnes qui s'allient donnent la somme de deux doubles puissances d'agir. Donc on a ici : 1+1 = 4. Notez que le simple fait d'enfanter sans créer de lien sociaux particuliers donnerait : 1+1 = 3, et que deux personnes restant simplement de leur côté donneraient : 1+1 = 2. On voit donc aisément que la coopération et les liens sociaux sont le moyen le plus efficace de faire le bon, pour soi comme pour autrui.

C'est donc là que j'arrive à justifier mon titre. L'augmentation de la puissance d'agir, c'est-à-dire, l'aspiration à plus de liberté, se borne naturellement par la liberté d'autrui. On a donc prouvé l'article IV de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen (DDHC) :
"La liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui".
Ainsi, la liberté de l'un est naturellement bornée par celle de l'autre. Chacun garde ce qui lui est propre, ce qui lui appartient ou lui est dû. Et ainsi, la Liberté mène à l'Équité.

2 commentaires:

  1. Je suis pas sûre d'avoir compris ta conclusion (punaise, j'étais à la fin de l'article et je me disais "pour une fois, j'ai tout compris !", eh bah encore raté (caramba)...), mais pour tout le reste j'aime cet article. :)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Betta a également remarqué que la fin n'était pas évidente. Du mal à relier les idées entre elles ^^" J'expliquerai plus tard...

      Supprimer